En 1878, l'écrivain Louis Stevenson (L'île au trésor) relie Monastier-sur-Gazeille à Saint Jean du Gard à pied, accompagné d'un âne. Son carnet de voyage, Voyage avec un âne dans les Cévennes, a permis de retracer son parcours qui est devenu le GR70 dit "Chemin de Stevenson".
Je vais commencer ce parcours 20 km plus au nord, au Puy en Velay et le terminer 26,5 km plus à l'est à Alès pour un total d'un peu plus de 250 km en traversant les départements de la Haute-Loire, Ardèche, Lozère et Gard.
Je souhaitais effectuer une balade pour (re)découvrir quelques belles régions françaises en toute liberté (= sans Stéphane ... Hi Hi Hi !). Pour ma première itinérance en solitaire, j'ai préféré un chemin facile, bien balisé et assez fréquenté pour rencontrer quelques randonneurs.
Je vais alterner camping, gîte et pourquoi pas bivouac sous un tarp au milieu de nulle part ... Tout est possible ! Je vais enfreindre la règle de l"ultra-light" en apportant un bon gros bouquin pour mes longues siestes bien méritées dans les prés... Je profiterais des nombreux petits villages pour me restaurer (faut que j'étudie au plus vite la gastronomie locale...). Il faudra quand même marcher un peu ... 250 km en 9 jours.
Pour la liste complète de mon équipement, c'est ici !
Et pour la carte du parcours, c'est par là !
Samedi 9 juin 2012 : Le Puy-en-Velay - Le Monastier-sur-Gazeille
19km, +570m, -320m
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Petit changement de programme pour cette première étape : Stéphane a les pieds qui le démangent ; il décide donc de m'accompagner jusqu'à Monastier-sur -Gazeille et de repartir le dimanche à Lyon.
Nous commençons par faire un petit tour dans la jolie ville du Puy-en-Velay : cathédrale, rocher Corneille, petites ruelles et le marché. Puis en fin de matinée, nous nous mettons en route : nous suivons jusqu'au Monastier, le GR 430, le chemin de Saint-François-Régis.
Le chemin monte pour sortir de la ville ; nous rattrappons une allemande qui commence elle aussi le chemin de Stevenson et hésite sur la direction à suivre. Nous la renseignons et poursuivons la montée jusqu'au village d'Ours. Puis nous cheminons entre petites routes, prés bien verts et bois. Pendant notre pause déjeuner, l'allemande nous rattrape et nous avoue s'être un peu égarée... Nous la rattrapons un peu plus loin, juste avant le village de Coubon : je l'aperçois devant nous mais sur le mauvais GR, elle a raté la bifurcation du GR430 ! Stéphane la rattrappe en courant pour l'avertir. Au moment de la rejoindre, elle venait de se rendre compte de son erreur ! Nous marchons un peu ensemble puis elle nous laisse au village pour sa pause déjeuner. Nous continuons tranquillement jusqu'au village du Monastier. Nous savions que le gite était au début du village mais nous sommes un peu paumés. Soudain, nous sommes interpellés par une personne au premier étage d'une maison : "Vous allez jusqu'où ce soir ?", "Bah, on s'arrête ici", "C'est quoi votre nom ?", "Bah, Maire", "Et bien bienvenue au gite de Stevenson !". Accueil chaleureux ! Nous nous installons et faisons une petite visite de la ville.
Dimanche 10 juin 2012 : Le Monastier-sur-Gazeille - Landos
34km, +940m, -770m
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Stéphane repart vers Le Puy en courant et je m'élance sur les traces de Stevenson et Modestine.
Je traverse le village puis descends pour traverser la Gazeille puis remonte ... puis redescends jusqu'au village du Goulet où coule la Loire avant de remonter, là c'est quand même bien raide ... C'est très vallonné, vert, avec beaucoup de genêts (buisson de fleurs jaunes) et pleins de petits hameaux ou villages aux maisons en pierres sombres.
Un peu avant le village d'Ussel, je me trompe à un croisement et continue sur le GR44 (Tour du Velay) ... Faut le faire : j'ai un GPS, le topoguide et il y avait des panneaux ... ! Mais bon, c'est pas très malin de donner à tous les GR le même balisage, rouge et blanc ! Je me rends compte de mon erreur au hameau du Croc Pouget. Au lieu de revenir sur mes pas, je préfère continuer un peu sur le GR44 et rattraper le GR 70 un peu plus loin aux Bargettes ... Environ 4 km de plus au compteur pour contourner le mont Burel sous une petite pluie ...
Puis je continue jusqu'au Bouchet-Saint-Nicolas, il fait de plus en plus mauvais : pluie, vent, et nuages bas ... Je renonce au petit détour pour aller voir le lac du Bouchet et commence à me dire que pour ma première nuit en solo sous la pluie et dans le froid un gîte serait plus sympa qu'un tarp ...
J'accélère le pas et arrive rapidement à Landos où je vais directement au gîte communal ; le gardien très accueillant me fait visiter les lieux ; j'ai tout le gîte rien que pour moi, apparement tout le monde a dû arrêter au Bouchet ... En début de soirée, je vais dans le bar-restaurant du village où je déguste le succulent et copieux menu du jour. Le fils de la serveuse, 3 ans, me tient compagnie ; puis je me couche enfin, je suis bien fatiguée par cette première journée.
Lundi 11 juin 2012 : Landos - Cheylard-L'Evêque
36km, +800m, -930m
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Ce matin, le ciel est bien couvert et il fait toujours aussi frais ; le chemin est facile et offre des vues dégagées sur la campagne vallonnée puis sur le lac de Naussac.
Peu avant le village de Pradelles, je croise un marcheur puis je rencontre sa femme avec qui je marche jusqu'au village : il a déjà fait 7 fois le chemin de Stevenson (!!!!) et apparemment ne s'en lasse pas ! Cette fois-ci, il fait des petits aller-retour chaque jour et retrouve sa femme tous les soirs.
Je traverse le village de Pradelles qui est très joli : vieilles maisons en pierre et petites ruelles ; je continue jusqu'au village de Langogne en contrebas et à proximité du lac de Naussac. Il est midi et le village est un peu mort ... je déjeune avant de répartir direction de Cheylard-L'Evêque ; le temps s'est bien dégagé et il fait bien chaud sur la petite route que je suis.
Puis je continue dans la forêt plus ombragée ; le ciel se couvre de nouveau, la pluie arrive, puis la grêle, puis la pluie ... je suis fatiguée : je n'ai pas le courage d'aller jusqu'à Cheylard et plante mon tarp dans la forêt à quelques pas du chemin. Bien au chaud dans mon duvet, j'entends les chiens aboyés au loin, des bruits de biches près de ma tente ... à moins que cela soit la bête du Gévaudan qui rôde ...
Mardi 12 juin 2012 : Cheylard-L'Evêque - Mirandol
35km, +770, -930m
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Le ciel est encore couvert et il fait assez frais (5°C à 6h) ; je continue la descente jusqu'à Cheylard, que je traverse, désert en cette heure matinale (7h30) ; je monte et descend dans la forêt, tout est paisible ; c'est agréable.
Je descends jusqu'au village de Luc, surplombé par quelques ruines d'un château puis suis l'Allier jusqu'à la Bastide-Puy-Laurent ; la rivière marque la frontière entre la Lozère et le Gard.
A la Bastide, je m'offre le resto et un plat local "maoche et lentilles" puis attaque une belle montée un peu ennuyante : une piste sans fin bordée de genêts en fleurs ; au sommet, la pluie arrive et avec le vent fort et frais, je ne traîne pas. J'arrive au petit village de Chasserades et continue jusqu'au Mirandol, 1km plus loin en contrebas sous le viaduc de la voie ferrée.
Ce soir, c'est nuit en gîte ; j'y retrouve plusieurs femmes qui suivent également le chemin de Stevenson, quelques unes ont déjà bien marché (intégralité du chemin de compostelle, ...) et d'autres débutent dans la randonnée itinérante. L'ambiance est très sympathique ; nous dînons au retaurant de Chasserades un repas copieux ... qui me donnera quelques souci de digestion ...
Mercredi 13 juin 2012 : Mirandol - Le Pont de Montvert
37km, +1220m, -1460m
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Le ciel s'est bien dégagé ; enfin, le temps semble aller vers le beau ! Tant mieux car aujourd'hui, j'ai prévu de faire l'ascension du point culminant de la Lozère, le sommet de Finiels à 1699m, et ce serait plus agréable sous le soleil !
Mirandol est vraiment au fond d'un trou et le chemin commence par une bonne montée ; grâce peut-être à toutes les calories ingurgitées hier soir, j'ai la pêche et marche d'un bon pas. Après la forêt, je suis une petite vallée fleurie et verdoyante où coule le Lot et arrive au village de Bleymard au pied du Mont Lozère où je déjeune.
Peu après midi, je commence la montée, après un peu de forêt, j'arrive à la station de ski du Mont Lozère ; il n'y alors plus aucun arbre et le paysage est bien différent des jours précédents. Je monte au sommet en suivant les montjoies, grandes pierres ; le sommet ressemble à un grand plateau complètement dénudé ; le vent est fort et glacial ; je m'abrite derrière un petit mur de pierres puis continue mon chemin direction plein sud , avec une vue magnifique sur les Cévennes. La descente jusqu'au village du Pont de Monvert est maginifique : des prés verts et fleuris parsemés de rochers.
Après les régions du Velay puis du Gévaudan, j'entre dans les Cévennes, terre prostestante où en 1685, suite à la révocation de l'Edit de Nantes ( le roi de France avait reconnu la liberté de culte aux protestants en 1598), les camisards entament une véritable guerre contre leurs persécuteurs. Tous les villages que je vais traverser ont désormais une Eglise catholique et un Temple protestant.
Au fond de la vallée, le village est traversé par deux rivières : le Tar et le Riumalet. Il y a beaucoup de randonneurs au village que je traverse pour aller au camping. J'y retrouve Michel, un randonneur de 65 ans qui fait le chemin de Stevenson avec plus de 20 kilos sur le dos ! Nous discutons matériel et sport, c'est sa première rando itinérante et il commence à comprendre qu'il a un sac un peu lourd ! Nous comparons notre matériel ... par exemple ses deux grandes serviettes de toilette avec ma serviette de 20 cm2 type chamex ...
Jeudi 14 juin 2012 : Le Pont de Monvert - Florac
30km, +810m, -1050m
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La nuit a été fraîche : le village est encaissé et avec les deux rivières, c'est bien humide. Ce matin, une belle montée nous attend jusqu'au sommet de Bougès. Nous partons ensemble avec Michel mais je le distance rapidement ; de toutes façons il ne va pas jusqu'à Florac, il veut couper le chemin au col du Sapay et aller directement à Saint-Julien d'Arpajon pour gagner une quinzaine de kilomètres.
Le paysage est superbe, le ciel est bleu et le temps se réchauffe enfin. Le sommet offre de magnifiques vues sur les montagnes de Lozère puis c'est de la descente à travers une forêt de pins. Je rattrape Emmanuel, c'est son second Stevenson et il marche d'un bon pas. Nous marchons un peu ensemble puis je le laisse pour déjeuner ; nous nous retrouverons peut-être à Florac. Après la descente et la forêt, j'arrive au bord du Tarn que je longe de Bedouès à Florac, l'eau claire donne envie de se baigner mais ça doit être bien frais !
A Florac, je fais quelques courses et vais m'installer au gîte communal à coté de l'Eglise ; je suis seule pour l'instant mais des randonneurs devraient arriver plus tard. A 19h, arrivent 5 randonneurs, un groupe de 4 qui ne font qu'une partie du chemin et s'arrêtent à Florac et Anita qui en fait l'intégralité.
Nous allons dîner ensemble dans une petite pizzaria à côté du gîte ; ils sont très sympas et nous rigolons bien.
La nuit est rythmée par la cloche de l'église qui sonne toutes les heures et demi-heure et les ronflements de mes compagnons ... Moyen...
Vendredi 15 juin 2012 : Florac - Saint-Germain de Calberte
36km, +680m, -890m
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Après un dernier petit tour dans le village, je reprends le chemin et ne tarde pas à rattraper Emmanuel, nous marchons ensemble une dizaine de kilomètres puis nous nous séparons : il est presque arrivé à son étape du jour alors qu'il me reste une vingtaine de km ... il faut que j'accélère un petit peu. Entre Saint-Julien d'Arpajon et Cassagnas, nous suivons l'ancien tracé du chemin de fer qui reliait Florac à la ligne Nîme-Paris. Le village de Cassagnas doit sûrement être un des seuls villages français à ne pas avoir d'Eglise : il y a uniquement un temple protestant.
A l'ancienne gare de Cassagnas, je déjeune avant de monter dans la forêt ; les vues sont belles sur les montagnes boisées des Cévennes. Je redescends vers le village de Saint Germain de Calberte via le col de la pierre plantée, la forêt est un mélange de pins et de chataîgniers.
Après quelques courses à l'épicerie, je quitte le chemin pour aller jusqu'au camping de la Garde qui semble désert mais j'ai la bonne surprise d'y retrouver Michel, épuisé et deux jeunes filles qui font une partie du chemin vers le nord.
Il fait bon, et je savoure mon dîner au soleil : cake à la chataîgne, yaourt à boire et banane.
Samedi 16 juin 2012 : Saint-Germain de Calberte - Col d'Uglas
34km, +1130, -1000m
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La nuit a été douce et j'ai eu trop chaud dans mon duvet ; j'avais un peu peur d'être dévorée par les moustiques pendant la nuit sous mon tarp mais finalement rien de bien méchant. Je savoure encore un peu mon lit douillet et ne suis pas encore levée quand j'entends Michel partir. Il s'arrête à Saint-Jean-du-Gard dans une vingtaine de kilomètres ; c'est la fin officiel du chemin de Stevenson mais quelques uns comme moi continuent jusqu'à Alès. Je ne suis pas pressée car ce soir j'ai prévu de bivouaquer entre Saint-Jean et Alès. Il me reste environ 45 km à faire en deux jours ; j'ai le temps et je compte bien profiter de ces derniers moments.
A Saint-Etienne-Vallée-Française, je fais une bonne pause et goûte quelques spécialités locales : gâteaux à la chataigne, fromage de chèvres ...
Puis le chemin monte vers le Col Saint Pierre, je rattrappe Michel qui fait une petite pause à l'ombre, il essaie de voir où nous sommes car il veut déjeuner à la moitié de la montée. Grâce au GPS, je vois qu'il ne reste que 700m pour arriver au col, du coup il décide de continuer et nous sommes bien récompensés : des tables de pique-nique nous attendent à l'ombre de grands pins ; nous mangeons ensemble.
La descente jusqu'à Saint-Jean-du-Gard se fait en pleine châleur, nous sommes de plus en plus bas en altitude et le temps se réchauffe de jour en jour ; je longe le Gardon jusqu'à Saint-Jean ; la ville est déserte et je dois attendre 15h, l'ouverture des magasins, pour faire quelques courses de nourriture. Il fait chaud et je fais le plein d'eau ; au moment de repartir, Michel arrive, il est bien content de cette première expérience de randonnée et a hâte de recommencer une fois ses pieds reposés et son sac allégé !
Je commence la montée vers le col d'Uglas par une petite route, il fait très chaud et je m'arrête à une rivière, le Gardon, pour me baigner et me rafraîchir. Puis je traverse quelques hameaux aux jolies maisons de pierres et continue jusqu'au col d'Uglas ; je poursuis jusqu'à une table d'orientation d'où le paysage est splendide ; l'endroit me paraît pas mal pour passer cette dernière nuit et je m'installe. Je bouquine tranquillement en admirant le coucher de soleil. Un renard passe à quelques mètres de moi sans me voir ... Oups ! J'espère qu'il ne va pas revenir pendant la nuit ! Il fait encore chaud et la nuit promet d'être douce.
Dimanche 17 juin 2012 : Col d'Uglas - Alès
16,5km, +490m, -900m
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Je suis réveillée à l'aube par les premières lumières et commence à marcher à 6h30, il fait déjà chaud. Le chemin suit les crêtes boisées, ça monte, ça descend, la végétation est dense et il y parfois des rochers à passer. Au sommet du mont Moncalm, je profite d'une vue à 360°C. Puis c'est la descente parfois raide jusqu'à la ville d'Alès.
La trace complète du parcours sur Google Earth
Cette semaine de rando a été très agréable ; les paysages sont variés et le chemin traverse une région chargée d'histoire.
Il y a quelques passages sur le bitume ce qui peut-être désagréable par forte chaleur. Le chemin est souvent à plus de 1000m d'altitude, ce qui permet d'avoir un peu de fraîcheur.
Si c'était à refaire, je ne prendrais pas de tente et dormirais en gîte pour avoir un sac très léger ; j'ai trouvé de la place facilement mais pour certaines étapes il peut être indispensable de réserver pour avoir une place en gîte ou hôtel.
Je vous recommande vivement la lecture du Voyage avec un âne dans les Cévennes, pour vivre ou revivre ce bel itinéraire !
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